La « Marche pour la réalisation du rêve » unira le nord au sud pour affirmer les droits à la santé et au logement

L’itinéraire longera les côtes du golfe du Mexique où le programme de reconstruction après le passage du cyclone Katrina a surtout signifié la confiscation de fonds et de terres par des investisseurs, aux dépends des plus pauvres et des ouvriers. La marche traversera des communautés du Mississippi où vit toujours la mémoire des actions collectives inspirées par l’appel de Martin Luther King pour la « Campagne des pauvres ». Elle empruntera les chemins des Appalaches où des travailleurs sans papier massivement recrutés par les usines il y a encore quelques années, sont aujourd’hui éparpillés dans les collines où ils se cachent des services de l’immigration afin de préserver leur famille. Les manifestants passeront par les villes-champignons du Tennessee où l’explosion du chômage, du nombre de sans-abris et du refus de soins aux nouveaux pauvres offre un terrible contraste avec la vie encore somptueuse des nouveaux riches. Ils suivront les routes du Kentucky, épicentre de la lutte contre le retrait des enfants de leur famille, dont les droits économiques ont été bafoués. Ils passeront enfin par l’Ohio, symbole et triste réalité de la transformation de la région manufacturière américaine, la « Manufacturing Belt », en région industrielle déclinante, la « Rust Belt », où des centaines de milliers d’ouvriers, qui incarnaient les rêves de la classe moyenne n’ont plus ni travail, ni maison et se battent désormais contre les processus de privatisation pour conserver, au moins, leur accès à l’eau. Ensemble, au milieu des effets préjudiciables de la recherche de main d'œuvre bon marché par le capital mondial, humiliés et abandonnés par un gouvernement américain complice, des milliers d’habitants de ces différentes régions des Etats-Unis, qui se sont rarement, voire jamais réunis pour une action commune, se préparent à marcher ensemble pour affirmer leurs droits élémentaires à tout ce que « l’âge électronique » rend possible et indispensable.

Les manifestants insisteront sur les deux sujets les plus douloureux pour la classe montante des Américains démunis : les soins médicaux et le logement. La hausse fulgurante du coût des soins médicaux a mené des millions de familles à la ruine alors que les compagnies d’assurance privées dotaient leurs managers de salaires à six chiffres et récompensaient leurs traders de bonus pour « amélioration de la productivité » ce qui signifie généralement le gonflement des bénéfices en refusant d’accorder les soins préconisés par des médecins. Pendant ce temps, les seuls projets de réforme toujours en cours d’examen au Congrès, dont la proposition soutenue par le Président Barak Obama, ne touchent pas à la très rentable industrie de l’assurance et laissent des milliers de ménages sur le carreau. Les manifestants réclameront la seule solution raisonnable, la sécurité sociale pour tous.

La marche pour « Zéro expulsion, zéro saisie ! »

Sur le terrain du logement, des millions de saisies immobilières ont déjà eu lieu. Plus de 25 % de ceux qui ont toujours un toit voient la valeur de leur crédit immobilier dépasser celle de leur maison. C’est ainsi que des millions de familles sont envoyées vers le marché locatif – un autre de ces secteurs dirigés par le profit – où la chute des revenus comme la hausse des loyers pourrait bien mener à des expulsions et à une augmentation du nombre des sans-abris. De nombreuses familles confrontées à des loyers inabordables viennent déjà gonfler les rangs des SDF. L’âge moyen d’un SDF aux Etats-Unis est de huit ans et le phénomène concerne de plus en plus les familles. Les manifestants défileront aux cris de « Zéro expulsion, zéro saisie ! »

Les organisateurs de la « Marche pour la réalisation du rêve » et ses participants savent bien que le monde a changé depuis l’appel de Martin Luther King pour la « Campagne des pauvres » en 1968. Ces bouleversements sont synonymes d'anéantissement pour des millions d’Américains et inévitablement pour des milliards de personnes dans le monde à qui l’Amérique fait la guerre pour dynamiser son économie, et, plus pervers encore, pour fournir des emplois de soldats à ses jeunes. Mais le changement inspire aussi l’espoir. Les millions de travailleurs rendus inutiles dans une époque marquée par la production automatisée – la nouvelle classe d'expropriés – sont de plus en plus conscients de la nature de leur détresse et de leur pouvoir collectif d’exiger pour eux comme pour tous, le droit au minimum vital, si facile à produire aujourd’hui. Tous ne s’accorderaient peut-être pas sur la définition d'une nouvelle société. Mais tous approuveraient la déclaration de Martin Luther King en 1965, devant le Negro American Labor Congress (créé en 1925 pour faire avancer les droits des Afro-Américains ndlt) : « Ce pays exige une meilleure distribution de la richesse, pour tous les enfants de Dieu ».

La « Marche pour la réalisation du rêve » est un projet de la Campagne pour les Droits Humains et Économiques des Pauvres (Poor People's Economic Human Rights Campaign (PPEHRC)) et fait désormais partie du programme du Groupe de travail sur la pauvreté du Forum Social Américain, co-dirigé par Marianne Kramer, de l’Organisation pour les droits sociaux du Michigan. La liste croissante de ses adhérents et organisateurs inclut désormais l’association Healthcare Now ! (http://www.healthcare-now.org )

Le mois prochain: la communauté internationale rejoint la « Marche pour la réalisation du rêve »